Moto GP, interview exclusive Hervé Poncharal, part. 3 : On est des Gaulois et moi j'y crois

Dernière partie de l'entretien accordé à
Moto-Station par Hervé Poncharal. Après la revue des troupes Tech3 et
l'avenir d'un Moto GP qui ferait donc sa révolution en 2017, voici le
sentiment du seul patron français parmi l'élite sur une retransmission
des Grands Prix devenue payante. Mais aussi sur cette question
douloureuse : de quel mal souffre la moto tricolore ?





En 2013, il ne sera plus possible de suivre le Moto GP
gratuitement à la télévision française. Que penses-tu de cette situation
? Est-ce un problème de coûts de retransmission ou un choix politique
des chaînes ?

On ne peut pas ne pas regretter la perte de la gratuité de la
retransmission. Ce que faisait NT1 sur la TNT, c'était très, très bien.
Mais les droits du Moto GP appartiennent au groupe TF1 au sein duquel
Eurosport a l'exclusivité. Et c'est Eurosport qui ne s'est pas entendu
avec NT1 qui, par ailleurs a décidé de revoir sa grille des programmes
pour viser un public plus féminin. La DORNA n'a rien à voir dans cette
perte de la gratuité. C'est un problème au sein d'un groupe TF1.

Ceci dit, je sais qu'Eurosport va améliorer et faire évoluer sa
couverture de l'événement. C'est le genre de décision politique qui
s'est déjà vu en Europe. Je rappelle qu'en Italie, ça passe sur Sky, une
chaîne thématique. Et nous ne sommes pas les seuls concernés : la
Formule 1 est passée sur Canal+. Les chaînes généralistes préfèrent
passer des séries plutôt que de dépenser plus pour des retransmissions.
Elles doivent ratisser large. Elles ne sont pas concernées par les
niches. Et c'est économiquement imparable !



Alors la gratuité du sport à la télé, c'est définitivement terminé ?

Je ne suis pas du genre à me lamenter sur le lait renversé. C'est à nous
de créer un produit suffisamment excitant pour être demandé par les
chaînes. Il faut que l'on ait un produit sexy, avec du spectacle et
qu'il soit moins onéreux, ce qui fera baisser les droits de
retransmission. On sensibilisera alors la politique des chaînes. C'est
incontournable.



On a vu que le team CIP a rassemblé des dizaines de milliers de
personnes passionnées pour une présentation d'un programme Moto3 dans un
village inconnu. Français, tu trouves des budgets en Grande-Bretagne.
Quelle est donc la malédiction qui frappe la moto en France ?

En France, on est plus pragmatique, plus cartésien. En Espagne, on aime
la folie, on est prêt à s'endetter pour la moto, et en Italie c'est la
même chose, on s'y engage plus, c'est dans leur ADN. Pas en France. On
n'est pas comme ça. Je suis plus connu en Espagne et en Italie qu'en
France. Il y a une synergie avec les pilotes qui sont des héros locaux,
de véritables locomotives. En France, c'est plus ponctuel.
Lorsqu'Olivier Jacques a eu le titre, il y a eu de l'intérêt.

Pourtant les acteurs sont là. La FFM fait son travail et on a un super
Grand Prix de France géré par un Claude Michy qui, avec son équipe, est
cité en exemple par Carmelo Ezpeleta. Le Grand Prix de France est un GP
populaire et l'un de ceux qui marchent le mieux. Malgré ça, c'est vrai :
avec Danny Kent, j'ai eu un sponsor et avec Louis Rossi, j'ai vu des
entreprises françaises qui m'ont écouté poliment. Je fais ce métier
depuis plus de 30 ans. C'est comme ça !

Cependant, il n'y a pas de fatalité. Il faut continuer à bosser et
mettre du gaz. On est des Gaulois et moi j'y crois. Je me battrai pour
montrer qu'en France, on peut gagner. Il y a de l'espoir.



Par Emile Zoosk, photo Tech3